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Leica Compur (ou « modèle B » )

vendredi 1er mai 2015, par Jean D.

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Leica Compur « ring-set » et filtre jaune n° 1 (photo © Jean)

Une étonnante exception… voire une surprenante parenthèse !

En 1926 est apparu, parallèlement au Leica I (ou « modèle A »), ce curieux frère cadet possédant un obturateur central à lamelles de type « Compur » au lieu de l’obturateur à rideaux qui se maintiendra jusqu’aux productions récentes de la lignée arborescente du Leica « classique » ; le Leica Compur demeure donc tout à fait particulier, le seul Leica à obturateur central (1), ancré à la racine de cette lignée…

La raison de l’adoption d’un obturateur central demeure controversée :

  • disposer d’un obturateur pouvant prolonger la gamme des vitesses jusqu’à une seconde ?
  • rassurer certains clients qui n’auraient pas fait confiance à l’obturateur à rideaux ?
  • abaisser le coût de fabrication ?
  • Cette dernière hypothèse demeure la plus vraisemblable.

Description du boîtier lui-même

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(photo © Jean)

Le Leica Compur possède la même forme que le Leica I et ses dimensions sont strictement identiques ; comme chez son frère aîné, capot et semelle sont laqués noir et la ceinture est gainée de vulcanite, les boutons sont nickelés. (2)

Décrivons le capot, de droite à gauche en le regardant par l’arrière :

  • le bouton moleté d’entraînement du film (dépourvu à sa base du compteur de vues coaxial présent chez le Leica I),
  • le levier inverseur de marche à deux positions selon les lettres « A » et « R », initiales de Aufnahme et de Rücklauf, signifiant respectivement « prise de vues » et « retour » (rembobinage), (3)
  • le disque compteur de vues à couronne nickelée (parcouru par un index rotatif) et son bouton tangentiel bombé au sommet légèrement alveolé (l’ensemble occupant l’emplacement dévolu au barillet des vitesses et au déchencheur chez le Leica I et leur ressemblant d’ailleurs quelque peu),
  • la griffe porte-accessoires (généralement un télémètre FODIS) au dessus de laquelle est gravé le numéro du boîtier,
  • le même viseur tubulaire de type Galilée inversé que celui du Leica I,
  • le bouton moleté de rembobinage. (4)

Entre ces deux derniers éléments, on admire la gravure de l’ancien logo de Leitz « aux lentilles stylisées » schématisant un condenseur de microscope (vu en coupe), disposée transversalement et emplie d’un fin cordon de bismuth.

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L’ancien logo de Leitz « aux lentilles stylisées »

Comme chez quatre autres modèles contemporains, on remarque au centre de la face arrière du Leica Compur une « vis obturante » noire affleurant la vulcanite : il s’agit de l’obturation d’un orifice de la ceinture qui permit l’ajustage du tirage optique.

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Face arrière du même Leica Compur « ring-set » ; remarquer au centre la « vis obturante » noire affleurant la vulcanite.
(photo © Jean)

L’abandon du couplage

En raison de la position de l’obturateur, situé à l’intérieur d’un objectif dépourvu de liaison mécanique avec le boîtier lui-même, le couplage entre l’avancement du film et son armement n’existe évidemment pas (cela entraîne bien sûr la possibilité de faire une malencontreuse double exposition) ; cette particularité était habituelle à l’époque chez la grande majorité des appareils photographiques, le Leica I constituant une remarquable exception. Il faut donc effectuer deux opérations indépendantes : avancer le film à la vue suivante et armer l’obturateur. On avance le film en appuyant sur le bouton bombé tangentiel au compteur (cette pression libère le film) puis en tournant simultanément le bouton moleté d’entraînement ; l’index du disque compteur de vues fait alors un tour complet jusqu’au numéro suivant.
On critiqua le report de l’obturateur sur l’objectif pour une autre raison, une modification de la vitesse après que la mise au point ait été effectuée pouvant la dérégler… mais c’est également le cas si on modifie l’ouverture du diaphragme.

Leica Compur et Mifilmca

Le Leica Compur ressemble beaucoup au Mifilmca de Leitz, un boîtier destiné à la photographie au microscope sur film 35 mm (5) ; le capot du Leica Compur diffère seulement par l’ajout du viseur et de la griffe porte-accessoires. A l’évidence, Leica Compur et Mifilmca dérivent tous deux du Leica I ; la ceinture des trois devait vraisemblablement être commune, répondant aux mêmes cotes et usinée de la même façon. La date de l’apparition du Mifilmca demeure cependant mal connue. Il est possible que le Leica Compur et le Mifilmca trouvèrent leur origine presque simultanément dans le creuset créatif qui animait Wetzlar, stimulé par l’apparition du Leica I : Compur et Mifilmca sont frères, chacun dans son domaine.

Les deux variantes du Leica Compur

Le Leica Compur fut produit selon deux variantes successives, désignées par leurs appellations « dial-set » et « ring-set » (ou « rim-set » pour les anglophones) en fonction de la position du réglage des vitesses d’obturation, respectivement sur deux cadrans (dial) circulaires voisins de l’objectif ou sur une couronne (ring) entourant ce dernier. Ces dénominations ne concernent pas particulièrement le Leica Compur mais s’appliquent au type de l’obturateur, également présent sur de nombreux autres appareils photographiques ; cet obturateur fut fabriqué par l’entreprise Friedrich Deckel, qui fournissait différentes marques (6). Quelle que soit la version, l’obturateur est monté à l’avant de l’objectif, un Elmar f:3,5/50 mm (7) escamotable ( « rentrant » ) et non interchangeable (comme celui du Leica I), l’enserrant dans une sorte de barillet annulaire noir, au pourtour finement guilloché de losanges afin de faciliter sa préhension ; on reconnaît l’aspect « Compur » très fréquent à l’époque, notamment chez les appareils dits folding. Cet obturateur ne comporte que trois lamelles, insérées entre le diaphragme-iris et la lentille frontale de l’Elmar.
Les vitesses sont les suivantes :
1 seconde, ½, 1/5, 1/10, 1/25, 1/50, 1/100 et 1/300ème de seconde, plus les pauses B et T.

L’entreprise Friedrich Deckel

Cet obturateur, portant l’inscription « COMPUR » au graphisme ornementé, provenait de l’entreprise de mécanique de précision bavaroise Friedrich Deckel, fondée en 1903 (sous le nom Bruns & Deckel) et établie à Munich, qui apposa sa marque (F. Deckel - München) et son logo aux initiales entrecroisées. Avant de se mettre à son compte en 1898, Friedrich Deckel travailla à partir de 1889 comme mécanicien, recruté par Ernst Abbe qui venait de prendre la direction de l’entreprise Carl Zeiss, à Jena (Iéna) en Thuringe ; il travailla ensuite chez Steinheil, à Munich.

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Friedrich Deckel (1871-1948) et le premier logo de son entreprise (tel qu’il apparaît sur l’obturateur du Leica Compur)

L’obturateur central « Compound » , à contrôle pneumatique, fut inventé en 1904 par Christian Bruns, l’associé de Friedrich Deckel dans la société initiale éphémère unissant leurs patronymes (Bruns & Deckel). L’année suivante, Christian Bruns abandonna cette coopération mais continua à travailler sur le sujet. Il déposa en 1910 un brevet décrivant un obturateur à contrôle mécanique, acquis par l’entreprise Carl Zeiss… qui le mit à la disposition de l’entreprise Friedrich Deckel, dont Carl Zeiss était actionnaire. Cet obturateur fut baptisé « Compur » , résultant de la fusion des mots compound et Uhrwerk (signifiant respectivement « composé » en anglais et « mécanisme d’horlogerie » en allemand), en référence au mécanisme permettant l’établissement de différents temps de pose.

Première version : le Leica Compur « dial-set » (ou « Dial Compur » )

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La version « dial-set » (document Pacific Rim Camera) ; remarquer notamment les lamelles de l’obturateur.

Il s’agit de la première version : le « dial-set » fut produit de 1926 à 1929.
Deux petits disques, situés de part et d’autre de l’objectif, permettent le réglage des vitesses :

  • un sélecteur à trois positions (lettres Z, D et M) oriente vers les pauses T et B et l’instantané (c’est-à-dire les différentes vitesses),
  • l’autre cadran, de plus grand diamètre, affiche la gamme des vitesses.

Quelle est la signification des trois lettres du petit sélecteur ?

  • « Z » et « D » sont les initiales des mots Zeit et Dauer, signifiant « temps » et « durée » (elles correspondent respectivement aux pauses T et B),
  • « M » est l’initiale de mechanisch gesteuert signifiant « à commande mécanique » , c’est-à-dire l’instantané.
    Ainsi, en photographie courante, le petit sélecteur demeurera sur la lettre « M » et la vitesse choisie sera affichée sur le cadran ; si une pose longue est nécessaire, on sélectionnera « Z » ou « D » (pause T ou B) et on utilisera un déclencheur souple vissé dans la prise filetée prévue à cet effet.

D’autres commandes permettent d’opérer :

  • comme chez le Leica I, le réglage de la mise au point par une rampe hélicoïdale avec blocage sur l’infini (au moyen d’une lame-ressort nickelée fixée en façade par deux vis), la distance minimale étant de un mètre,
  • le réglage du diaphragme par un doigt de commande (indications latérales),
  • l’armement de l’obturateur (petit levier),
  • son déclenchement (autre petit levier diamétralement opposé). (8)

Cette disposition des commandes, pouvant paraître peu ergonomique, était cependant habituelle à l’époque.

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Un autre « dial-set » [extrait de « Leica Collection » de Shinichi Nakamura, Classic Collection Publications (1992)]

Le Leica Compur « dial-set » présente plusieurs variations mineures :

  • le bouton bombé des 300 premiers ne possède pas d’alvéole (aspect « champignon » ), de même que le déclencheur du Leica I jusque vers le numéro 17000 (si l’aspect de ce bouton demeure absolument identique sa fonction est cependant différente),
  • la petite rondelle finement crénelée qui constitue l’oculaire est d’abord plate (300 premiers) puis légèrement concave,
  • le bouton du levier inverseur de marche est d’abord lisse puis moleté,
  • la flèche gravée indiquant le sens de rotation des deux boutons moletés est d’abord ornée d’un triple empennage puis dépourvue d’empennage,
  • la clé de la semelle présente d’abord une barrette diamétrale puis acquiert son « disque central » nickelé bien connu,
  • la rampe de mise au point de quelques rares objectifs descend à 50 centimètres au lieu de un mètre (seuls deux exemplaires appartenant à la série des numéros 5800 à 5865 sont signalés).

Deuxième version : le Leica Compur « ring-set » (ou « Ring Compur » )

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La version « ring-set » (photo © JCB)

La transition de « dial-set » à « ring-set » ne résulta certainement pas d’un choix de Leitz mais d’une importante modification décidée par le fabricant, désireux de simplifier l’utilisation de son obturateur (abandon des petits disques séparés) et d’en améliorer la robustesse (renforcement des deux petits leviers), mais aussi de renouveler le style en inscrivant cet obturateur dans le courant esthétique Art-Déco culminant à l’époque (simplification de la forme et adoption d’une concentricité rehaussée par le contraste du nickel).
Apparu en 1928, le « ring-set » fut produit essentiellement en 1929 et 1930 ; quelques boîtiers furent encore fabriqués jusqu’en 1941.
L’ergonomie est améliorée chez cette deuxième version, dont l’aspect paraît moins archaïque… D’importantes modifications ont donc été apportées : le sélecteur et le cadran ont disparu, leurs fonctions sont réunies sur la nouvelle couronne rotative finement dentée du barillet annulaire, désormais dépourvu de ces deux petits satellites ; cette couronne est nickelée, comme les boutons du capot et d’autres éléments. Ainsi, les commandes de l’obturateur et du diaphragme sont devenues coaxiales et leurs indications beaucoup lisibles, simultanément dans le même plan de la face avant. Seuls font légèrement saillie les deux petits leviers de l’obturateur, qui s’avèrent moins graciles et ne sont plus diamétralement opposés (situés à angle droit), ainsi que le doigt de commande du diaphragme. La gamme des vitesses demeure inchangée ; standardisation oblige, les lettres qualifiant les pauses « T » et « B » remplacent les lettres « Z » et « D » .

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Ce Leica Compur « ring-set » n° 34571 appartient à une série de 250 boîtiers fabriqués en 1930.

Remarquer en particulier :

  • la sobriété par rapport au « dial-set » ,
  • l’élégant contraste entre les parties nickelées et la laque noire,
  • l’apparition du laiton aux endroits davantage sollicités (légère abrasion qui participe à la beauté de cet appareil),
  • les lamelles de l’obturateur.
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Le même « ring-set » sous d’autres angles (photos © Jean)… Ci-dessus, l’Elmar est rentré ; remarquer notamment :
  • les deux petits leviers de l’obturateur,
  • la prise filetée pour déclencheur souple,
  • l’emplacement du numéro de fabrication.
  • Le Leica Compur « ring-set » présente deux variations mineures :
  • la forme de la griffe porte-accessoires varie d’arrondie à rectangulaire (cette dernière paraissant plutôt rare),
  • l’Elmar des tout derniers « ring-set » est numéroté.

Une volonté d’économie ?

L’avancement du film et l’armement de l’obturateur n’étant pas couplés, le mécanisme est simplifié… (9) Cela explique probablement la grande différence entre le compteur de vues du Leica Compur et celui du Leica I (perpétué ensuite) ; celui du Leica Compur est situé à l’emplacement occupé par le barillet des vitesses chez le Leica I, et son prix de revient devait être inférieur. Le même raisonnement s’applique bien sûr au compteur de vues identique du Mifilmca.
Il est également possible que recourir à un obturateur central, même acheté à un fournisseur, ait constitué une économie par rapport au prix de revient d’un obturateur à rideaux, d’autant qu’il ne comporte que trois lamelles.
Résultat de ces économies : le Leica I et le Leica Compur coûtaient en 1926 respectivement 220 et 192 reichsmarks (une autre source avance une différence de 33 % en livres sterling).

Combien de boîtiers ?

Le Leica Compur ne connut guère de succès, en comparaison du Leica I… Le nombre d’appareils fabriqués varie selon les sources ; les différentes listes publiées sont en effet partiellement contradictoires et recèlent certaines incohérences… Retenons une archive existant à Wetzlar, qui répertorie 1607 boîtiers en tout, se répartissant entre 638 appartenant à la première version ( « dial-set » ) et 969 à la seconde ( « ring-set » ) (10). La fabrication cessa en principe en 1932, cependant la numérotation d’une vingtaine de boîtiers « ring-set » correspond à d’autres années : 1934 (deux boîtiers), 1938 et 1939 (un boîtier chaque année) et jusqu’en 1941 (11) avec 16 ultimes boîtiers…
Certains Leica Compur portent un numéro appartenant à une série affectée au Leica I ; ceci n’est pas avéré par cette archive mais correspond cependant à la réalité (voir l’illustration plus bas).
La rumeur qui affirme que la plupart des Leica Compur invendus ont été transformés par Leitz par la suite est probablement fausse.

Les accessoires et le code Leitz à cinq lettres

Un pare-soleil n’a apparemment pas été prévu et le FISON ne peut s’adapter : Leitz a dû considérer que le retrait de la lentille frontale de l’Elmar serait suffisant.

Quatre filtres vissants existent, destinés à l’Elmar du "ring-set" (12) :

  • trois filtres jaunes : n° 1 / léger (FICAT), n° 2 / moyen (FICOM) et n° 3 / dense (FICUR),
  • un filtre Uva (FIOKO).

Trois bonnettes vissantes existent, également destinées à l’Elmar du « ring-set » : ELCAT, ELCOM et ELCUR, permettant respectivement les rapports 1:9, 1:6 et 1:3,6.

Selon le code Leitz à cinq lettres (code télégraphique), le Leica Compur (versions confondues) est désigné par LECUR, sa sacoche en cuir trapézoïdale par ETROS et l’ensemble par LECOM.

Un modèle convoité par les collectionneurs

Le Leica Compur constitue une exception recherchée ; sa faible production explique sa rareté. La première version demeure de loin la plus rare, en raison de sa production nettement inférieure à celle du « ring-set » et aussi de la fragilité des deux petits leviers de l’obturateur, qui entraîna la mise au rebut de certains « dial-set » .

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Deux « ring-set » n° 50606 et 21748, tous deux fabriqués en 1930 (le premier cependant répertorié comme Leica I) ; photo prise à Bièvres le Samedi 13 Juin 2009 sur le stand de Hans Ploegmakers, le sympathique spécialiste de Delft (Hollande), déjà publiée ici.

Conclusion : un étonnant dissident de la première heure !

La lignée arborescente du Leica « classique » connut plusieurs étapes majeures : standardisation permettant l’interchangeabilité des objectifs (Leica I, modèle C standardisé), géniale incorporation du télémètre (Leica II « Couplex » ), rigidité accrue du châssis (IIIc), apparition de la monture à baïonnette et d’un extraordinaire bloc viseur-télémètre (M3), incorporation d’un posemètre (M5) et on connaît la suite… mais tous ces prestigieux modèles perpétuaient l’obturateur à rideaux. Le Leica Compur demeure très particulier par son obturateur central à lamelles, se différenciant d’emblée de son frère aîné puis de leur future parenté qui préféraient la toile caoutchoutée, choisissant prudemment une mécanique horlogère qui avait fait ses preuves chez d’autres marques. Voici donc une exception confidentielle, qui suscite l’intérêt par sa surprenante originalité. On sait que l’entreprise Ernst Leitz n’hésita pas à emprunter les chemins de traverse et à prendre des risques sur le plan industriel, voire à déconcerter sa clientèle ensuite reconquise… Le furtif et curieux Leica Compur constitue un exemple de l’imagination fertile qui régnait à Wetzlar, sous l’impulsion d’Oskar Barnack.

Notes

(1) Un mécanisme plus ou moins analogue à un obturateur central équipe néanmoins les nombreux appareils Leica assez récents dits « compacts » , mais ils n’appartiennent pas à la lignée fondatrice.

(2) Quelques très rares Leica Compur chromés et nickelés sont connus ; ils résultent vraisemblablement de commandes spéciales non répertoriées, ou furent reconditionnés à la demande de leur propriétaire comme cela a existé pour d’autres modèles.

(3) Deux têtes de vis servent de butées « A » et « R » à ce levier ; cette dernière est plus grosse et inhabituellement protubérante (c’est l’axe du cliquet de la roue à rochet).

(4) Les boutons moletés d’entraînement du film et de rembobinage possèdent un diamètre différent, respectivement 18,5 et 15,2 millimètres.

(5) Le Mifilmca (code MIFCA), doté d’un obturateur Ibsor (fabriqué par l’entreprise Alfred Gauthier, de Calmbach en Forêt Noire) et d’une lunette de visée, permettait de prendre de nombreuses photos successives, ce qui constitua un avantage par rapport aux dispositifs de microphotographie précédents (obturateur Ibsor et lunette constitueront le dispositif MIKAS en 1933). Le Mifilmca est devenu Kafilmca en 1932 (comportant un tube conique amovible sur une platine standardisée). Auparavant, Leitz fabriquait des chambres photographiques utilisant des plaques ou des plans-films de divers formats pour équiper ses microscopes, bien avant l’apparition du Leica. Après trois chambres en bois et en laiton (format 13 x 18 cm) apparues depuis le début des années 1880, citons notamment les chambres pyramidales métalliques à la peinture noire « craquelée » aux formats 4,5 x 6 cm (CAFOT), 6 x 9 cm (code inconnu) et 9 x 12 cm (MIKAM puis MAKAM), ces quatre dernières dotées du dispositif MIKAS.

(6) L’inscription « DRP 258646 » figure en arc-de-cercle autour de l’Elmar du « dial-set », mais n’apparaît pas sur le « ring-set » : il s’agit d’un numéro de brevet (Deutsches Reichs Patent signifiant « breveté par l’Empire allemand » ). Chaque obturateur (« dial-set » et « ring-set » ) porte un numéro de fabrication apposé sur son pourtour.

(7) La mention « Leitz Elmar 1:3,5 F=50mm » est gravée sur la couronne entourant la lentille frontale, à l’intérieur chez le « dial-set » et à l’extérieur chez le « ring-set » ; la gravure est comblée de bismuth.

(8) La fragilité des deux petits leviers permettant d’actionner l’obturateur du « dial-set » serait à l’origine de son abandon au profit du « ring-set » , dont les leviers sont plus robustes et mieux insérés.

(9) Cette simplification entraîna un poids légèrement inférieur : le Leica I et le Leica Compur « ring-set » pèsent respectivement 453 et 414 grammes (sans le bouchon de l’Elmar) ; pour mémoire, une copie fidèle du Leica 0 pèse 495 grammes.

(10) Cette archive étonne car la numérotation s’avère très erratique, surtout parmi les « ring-set » .

(11) L’étonnante résurgence de 16 « ring-set » en 1941 serait due à l’incapacité de l’usine, au début de la guerre, d’honorer les commandes d’autres modèles ; ces boîtiers auraient été fabriqués à partir de pièces détachées.

(12) La couronne entourant la lentille frontale de l’Elmar du « dial-set » est vraisemblablement d’un diamètre légèrement différent ; il semble que des filtres purent être commandés spécialement.

Bibliographie essentielle

Paul-Henry van Hasbroeck (1979) – Rare and unusual screw mount Leica cameras and accessories. Vol. I, part I. Photo Historical Publications, Londres.

Paul-Henry van Hasbroeck (1983) – The Leica. A History illustrating every Model and Accessory. Sotheby Publications, Londres.

Une excellente page décrivant l’évolution des obturateurs centraux : en allemand et en anglais.

Remerciements

Ma gratitude va à mon homonyme bordelais, car j’ai longuement discuté de la complexité et des subtilités du « Compur » avec ce grand connaisseur du Leica. Jean a bien voulu lire mon manuscrit et m’a conseillé quelques judicieuses modifications ; il a aussi utilisé une balance pour peser de magnifiques raretés au gramme près ! Je le remercie également pour les cinq illustrations dont la beauté enrichit cette page, à la suite de la photo aimablement fournie naguère par JCB.

Appendice

L’outillage d’alors ne possédant pas la qualité requise pour la réalisation de l’obturateur Compur, Friedrich Deckel fabriqua ses propres machines-outil destinées à cette fin ; l’industrie de la machine-outil devint le second coeur de métier de l’entreprise, qui n’abandonna cependant pas la fabrication des obturateurs (notamment pour Hasselblad dans les années soixante-dix).

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La fraiseuse « FP » fabriquée par l’entreprise Friedrich Deckel dans les années 1920

Le Summicron Compur

Bien que hors-sujet, rappelons à la fin de cette page l’existence d’un objectif destiné au Leica à vis (à l’époque au IIIf) possédant un obturateur central : le « Summicron Compur » (illustration ici), improprement dénommé ainsi car son obturateur est de marque Prontor (une filiale de Carl Zeiss)… Cette rarissime série de 150 Summicron f:2/5 cm (deuxième version) fut fabriquée en 1954, en monture à vis, équipée d’un obturateur central à lamelles délivrant deux vitesses (1/100ème et 1/200ème de seconde) synchronisées pour déclencher l’éclair d’un flash électronique ; un bras de commande dit « pont de déclenchement » actionne l’ensemble, l’obturateur du Leica devant être réglé sur la pause B. Cet objectif, surnommé « Blitz Summicron » , fut réservé à l’exportation vers les U.S.A. en 1955 mais seulement 58 furent vendus, probablement en raison de l’apparition du Leica M3 car le bras de commande ne pouvait s’y adapter ; les objectifs invendus furent cédés à des employés de Leitz vers 1960 (apparemment sans le bras de commande), qui les utilisèrent en photographie courante (obturateur ouvert).

[ copyright Jean Dejax / summilux.net / reproduction interdite ] - 05/2015


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