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Les orpailleurs clandestins de la forêt guyanaise

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 0:29
par anthropos
La forêt guyanaise est l'une des dernières zones de forêt équatoriale primaire.
Malheureusement, son sous-sol regorge de nombreux minerais parmi lesquels de l'or. La découverte de la présence de ce métal à la fin du XIXe siècle a été à l'origine d'une véritable ruée vers l'intérieur des terres: l'essentiel du peuplement étant jusque là situé sur la côte.
L'âge d'or de l'orpaillage a pris fin dans les années 50 avec la baisse du cours de l'or et le coût élevé de l'exploitation aurifère par des moyens artisanaux, dans des endroits très reculés, en pleine forêt amazonienne.
Or, depuis une quinzaine d'année, l'apparition de moyens mécaniques, transportables relativement aisémment ainsi que la hausse du cours mondial de l'or ont redynamisé ce secteur.
Les sociétés aurifères eurent alors recours à une main d'oeuvre étrangère (venue du Brésil) bon marché, soumises à de très dures conditions de vie et de travail sur ces chantiers.
Rapidement, certains de ces ouvriers décidèrent de travailler pour leur propre compte, en exploitant de manière illégale des sites aurifères en pleine forêt. On les appelle les garimpeiros.



Les photos qui suivent ont été prises au mois de novembre dernier, dans les environs du village de Saül, qui se trouve au centre géographique de la Guyane.

Il n'existe pas de route pour s'y rendre: la seule liaison avec le monde extérieur est l'avion.
Les lignes téléphoniques de France Télécom sont hors service depuis des années, sans aucune perspective de réparation... La seule possibilité pour communiquer avec l'extérieur reste la radio départementale et les téléphones satellitaires.

Fondé au début du siècle dernier par un orpailleur, le village de Saül a vu sa population décliner depuis une cinquantiaine d'année avec la fin de l'orpaillage traditionnel.
Aujourd'hui, il reste environ une soixantaine d'habitants permanents au village.
Depuis quelques temps, un afflux particulièrement important d'orpailleurs clandestins venus du Brésil converge vers Saül après l'annonce de la découverte d'une pépite de 2 kg.
De ce fait, plusieurs centaines de personnes (certains parlent de près d'un millier) vivent dans la forêt alentour.

Essentiellement originaires du Nordeste brésilien, la région la plus pauvre de ce pays, ils ont souvent emprunté l'argent nécessaire à leur voyage jusqu'en Guyane.
Après 2 jours de pirogue depuis la ville frontière d'Oyapoque, dans l'Etat du Para, ils ont marché pendant 8 à 10 jours, avec entre 40 à 60 Kg sur le dos avant d'arriver à Saül.

En moyenne, un chantier se compose d'un patron, qui possède généralement le matériel et fournit la nourriture aux ouvriers, de 4 à 5 ouvriers et d'une cantinière.
Mais il existe des chantiers bien plus importants, tout comme des garimpeiros qui exploitent seuls un petit ruisseau, armés uniquement d'une pelle et d'une bâtée...

Le plus souvent, ces chercheurs d'or arrivent tout au plus à survivre, au jour le jour. Rares sont ceux qui arrivent à gagner suffisamment pour envoyer de l'argent au pays.

Par ailleurs, il existe aussi de véritables villages avec épiceries, gargottes, boites de nuit et bordel, le tout en plein milieu de la forêt.

Or, dans ces échoppes, comme chaque fois que l'on se trouve sur des sites d'orpaillage, tout se négocie en or, et à prix d'or, justement.
Ainsi, un sac de 25 kg de riz coûtera fréquemment 15 grammes d'or, à 10 euros le gramme (le cours mondial oscille en 14 et 16 euros le gramme), soit 150 euros! Et tout est à l'avenant.
Donc, pour essayer de faire quelques économies, certains vont faire leurs courses au village de Saül. C'est ainsi que j'ai pu rencontrer le groupe auprès duquel j'ai passé une semaine.

Pendant ce séjour, des gendarmes sont intervenus sur certains sites. Les campements ont rapidement été prévenus par radio. Par conséquent, toute activité s'est arrêtée, les moteurs ont été démontés et cachés dans la forêt.

A défaut de prendre des photos de chantiers en activité, j'en ai donc profité pour m'intéresser un peu plus aux conditions de vie de ces garimpeiros.



1. Saül, un village décrépit, perdu au milieu de la forêt amazonienne.


2. Le seul moyen de s'y rendre: la voie des airs.


3. Une autre voie vers les cieux... Devant l'église, classée monument historique, mais où la messe n'est pas souvent dite.


4. Rencontre impromptue avec un orpailleur sur un sentier en forêt. Il se rend au village pour y acheter des provisions.


5. Une fois les courses faites, il faut les emballer et les sangler solidement sur des sacs à dos de fortune faits de bidons de produits chimiques.


6. Il faut encore marcher pendant 2h30 pour rejoindre le campement.


7. Carbet baché, servant de cuisine, de salle à manger et de "chambre" à certains des garimpeiros.


8. Profitant de journées de repos forcé du fait de la présence de gendarmes à proximité, Zilloc se fait couper les cheveux par Fernando.


9. Tabacco, après s'être fait raser le crâne.


10. Le soir, Jery écoute un match de foot est retransmis à la radio.


11. Un petit déjeuner, composé des restes de la veille au soir: gibier, riz, haricots rouges et couac (farine de manioc torréfiée).


12. La cuisine, où est préparée la cuisine composée invariablement de riz, haricots et couac.


:iboitier: M6 TTL
:iobj: ZI Biogon 2,8/28mm, sauf la 10 au summarit.
:ifilm: TriX, dont une partie poussée à 1600.

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 0:45
par pbenotti
J'aime bien !
Photos sympas, dépaysement et en prime, un sujet interessant :D

Les 1,2,3,8,10 :applaudir:

Ces photos

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 7:31
par yousse
sont de très grandes qualité. Je les attendais avec impatience, et je n'ai pas été déçu. Bravo. Un mot, encore !!!

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 8:34
par Paradoxal
Très beau et intéressant, anthropos. Et comme je te l'ai déjà dit une fois, tu portes bien ton pseudo!

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 9:13
par sylvain
Merci Anthropos pour ces images,tout ceci est très intéressant.

Je les attendais également.

Au plaisir de voir que sur celles-ci il n'y a point de superpositions... :wink:

J'imagine que la suite ne va pas tarder?

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 11:13
par chuber
anthropos je me régale ! un reportage à relire ....je reviens plus tard ! :wink:

MessagePosté: vendredi 26 janvier 2007 - 12:08
par anthropos
Salut,

Je poste d'autres image dans la journée.

Il s'agit, comme je l'avais dit dans la rubrique "travaux en cours" d'un sujet de longue haleine, sur une année.

Par conséquent, les images que je viens de poster ne sont qu'une première sélection, issues d'un seul séjour. Il y en a eu d'autres depuis, mais je n'ai pas encore fait l'editing.

très bon reportage !

MessagePosté: mardi 30 janvier 2007 - 22:04
par villegas juan carlos
J'ai choisi de m'exprimer sur la première partie du reportage parce qu'elle est celle qui me séduit le plus. Mais les deux sont d'une très grande qualité. La présentation du sujet est pédagogique et détaillée. Le texte est impeccable.

Et les images (et cela fait un équilibre très réussi) suggèrent plus le sujet qu'elles ne le montrent directement. anthropos, tu as fait preuve d'une grande maîtrise artistique, bravo !

MessagePosté: mardi 30 janvier 2007 - 22:41
par clicclac
Punaise :!: La 10, j'aimerai bien, beaucoup, vachement... trop quoi! l'avoir sur une de mes planches contacts :?
Bravo.

Amitiés

MessagePosté: mardi 30 janvier 2007 - 23:11
par anthropos
Allez, Clicclac, si tu veux, je te file une copie de celle dont cette image est issue :wink:

MessagePosté: mercredi 31 janvier 2007 - 7:59
par Coignet
J'ai revu plusieurs fois ce reportage. C'est vraiment bien. De plus c'est un sujet vraiment nouveau, inattendu.
La lumière est belle, les cadrages respectueux des sujets, le tout de manière absolument pas maniérée, naturelle, mais tenue. Les scanners sont largement perfectibles, mais on sent que ce qui est derrière est bon.

MessagePosté: mercredi 31 janvier 2007 - 9:45
par philipandre
Un tirage baryté 30x40 de la N° 10 avec une signature ... je veux bien ... 8)

MessagePosté: mercredi 31 janvier 2007 - 12:51
par michel (proteus)
anthropos,
je n'ai pas réagi de suite à ce reportage, car j'ai voulu prendre mon temps pour lire attentivement ton texte qui est d'un grande clarté pour nous expliquer la situation.
les photographies forment un ensemble bien homogène ce qui confère une conhérence à l'ensemble
je trouve que la numéro 10 est particulièrement réussie
michel

MessagePosté: mercredi 31 janvier 2007 - 13:29
par anthropos
Comme je l'ai déjà dit, il ne s'agit là que d'une première sélection.
J'ai essayé d'en faire un ensemble cohérent et, au vu de vos remarques respective, ce but a été atteint.
J'en suis très content.
Pour ce qui est des scans, j'en conviens, c'est très perfectible, et j'en suis le premier déçu, mais je pense que mon matériel y est largement pour quelque chose.

J'ai encore dans mes pochettes plusieurs dizaines de films non édités. Et puis je retourne à Saül la semaine prochaine...

En espérant retrouver les mêmes protagonistes, mais là, rien n'est moins sûr.

Ce qui est certain, c'est que je posterai d'autres images sur ce sujet que je suis pendant toute cette année.

MessagePosté: jeudi 16 août 2007 - 7:52
par Dahu
Suspension d'un projet de mine d'or en Guyane. Voir:
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 068,0.html