Droits d'images et violation d'intimité...

BaptisteSibé
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Bordeaux
J'entends brandir cette expression 6 fois par jour... "mon droit à l'image !!!!"

Peut-on considérer que l'on puisse tout publier de ce qui, photographié dans ou depuis l'espace public, n'entraine aucun préjudice réel?
bedojo
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corse
On a 4 heures, ou plus pour répondre à cette question?... :content:
BaptisteSibé
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Bordeaux
Je rêvais d'une réponse simple...
Chope Man
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Montreuil Sous Bois
Je lis beaucoup de remarques qui montrent de manière parfaitement attendue que la revendication par certains de leur "droit à l'image" ne fait qu'exprimer un côté grincheux et emmerdeur de ceux qui veulent nous empêcher de faire des images en rond.

Je le conçois parfaitement, moi qui ne vient avec d'autres que vous expliquer les règles.

Mais considérez plutôt la chose autrement: parce que vous connaîtrez bien le Droit, vous pourrez rétorquer à ceux-ci qu'au contraire (si tel est bien le cas) vous photographiez dans un espace public, que ce que vous avez photographié n'est pas protégé par le droit d'auteur ni n'est dégradant pour les personnes photographiées, que celui qui revendique n'est qu'un emmerdeur qui ne connaît pas la loi et qui ferait mieux de se renseigner... Par exemple.

Cette connaissance du Droit vous permettra donc le plus souvent de répondre à un fâcheux qu'il n'a de fait AUCUN droit.

C'est ainsi quand on se sait dans son bon Droit...

Allez et photographiez en paix.
Light is right! (Colin Chapman)
Paul
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BaptisteSibé a écrit :
Peut-on considérer que l'on puisse tout publier de ce qui, photographié dans ou depuis l'espace public, n'entraine aucun préjudice réel?


Oui, c'est à peu de choses près ainsi que toutes les jurisprudences ont tranché.

Tout est donc affaire de l'estimation du préjudice supposé :
- image dégradante, humiliante, diffamation
- danger lié au comportement du photographe (drones, accès non autorisé...)
- commercial, financier & droit d'auteur (ex: l'illumination de la Tour Eiffel si elle est un sujet principal de la photo)
- sécurité nationale pour certains immeubles ou certaines professions

Pour le reste, que ça soit énervant d'être pris en photo est compréhensible (en mode in your face comme B Gilden par exemple) mais pas lié à un droit particulier. C'est du même niveau que quelqu'un qui parlerait en criant en permanence dans la rue ou le métro : très irritant pour tout le monde mais pas interdit.

Et je partage l'avis de Fabrice sur le fait qu'utiliser le terme de droit à l'image véhicule un sens différent de la question du préjudice. D'ailleurs l'exemple cité de jurisprudence parle du droit sur l'image d'une chose.
Trésorier de l'association (jusqu'au 30 mars 2024)
Les Albums des Amis de Summilux.net. L'Album summilux.net 2023 est prêt !
Quelques images persos par ici : npct.fr/photos.
SEBASTREET
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Paris
Petit retour d'expérience ( mauvaise...).

Un ami photographe pour une revue sociale réalise le portrait d'un SDF sur les marches de l'Opéra Garnier afin d'illustrer le sujet des SDF en couv' de son journal...
Accord verbale bien sur avec le SDF avec qui il sympathise lors de la prise de vue...
Une fois la photo parue en une, mon copain retourne voir le SDF et lui donne un exemplaire du journal...
15 jours plus tard, il reçoit le courrier d'un avocat représentant le SDF et lui demande des dommages et intérêts à moins de présenter un accord écrit d'autorisation de reproduction...
L'avocat était passé devant le SDF et avait remarqué la revue qu'il tenait en mains, il lui a tout simplement demandé si il voulait se faire un peu d'argent facile !

Alors effectivement, une autorisation écrite ne protège pas de tout mais dans son cas il n'aurait pas perdu !
Alors effectivement aussi tout les avocats ne sont pas comme celui-ci (qui entre nous a obtenu plus d'argent en frais que le malheureux SDF...)

Doisneaux, Ronis et autres photographes de rue n'ont quasiment jamais eu de procès et pourtant ils ont publiés d'innombrables photos de gens... mais aujourd'hui c'est différent, les gens ont beaucoup plus facilement accès aux publications, ou bien leur entourage. Et la possibilité de récupérer un peu d'argent en plus, comme font les célébrités en attaquants les journaux peoples, est attractive.

Personnellement, un jour, j'avais publié une photo dans mon journal pour les médecins, d'un couple de dos au Jardin du Luxembourg, en train de lire au soleil...
Ils n'étaient pas spécialement reconnaissables mais eux bien sur pouvaient se reconnaitre. Le médecin de la femme l'a reconnu et lui a donné l'exemplaire... elle a écrit à mon directeur lui demandant des dommages et intérêts (a l'amiable avant d'attaquer en justice) car elle n'était pas avec son mari sur la photo et trouvait que c'était un préjudice.
Mon journal à payé 15000 francs à l'époque de peur du procès.

Une autre fois, un médecin s'est reconnu dans mon journal, de dos, avec sa sacoche dans la rue et voulait une compensation car il n'avait pas donné l'autorisation au photographe de le photographier. Malheureusement pour lui, j'avais passé la journée complète avec le médecin sur la photo pour un reportage sur un médecin rurale et j'étais sûre de mon coup, pour autant il a même argumenté qu'il reconnaissait le cuir de sa sacoche, son chapeau unique... bref un con ! J'ai du lui fournir une copie du reportage pour qu'il arrête de me harceler !

Donc vigilance... en tout cas, vu que c'est mon métier, je suis obligé d'être vigilant, de faire signer dés que je peux une autorisation et c'est galère je l'avoue !

Et en plus, même avec une autorisation, il suffit que la légende dise le contraire de la photo...

C'était mon petit retour...
Chope Man
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Habitué
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Depuis le 18 nov 2010
Montreuil Sous Bois
Paul a écrit :
...D'ailleurs l'exemple cité de jurisprudence parle du droit sur l'image d'une chose.


Ceci ne valant que pour l'exemple cité, puisque c'était l'objet.

Pour le reste, le "petit retour" de SEBASTREET est loin d'être petit. Il est intelligent, réaliste et prudent.

Nous déplorons tous le côté procédurier de ceux qui revendiquent des droits ou des dommages hors de propos. Mais c'est un fait sociétal dont il faut hélas tenir compte. Et plus on connaît le Droit, plus on peut éviter les ennuis ou se prémunir contre de tels excès.

CQFD.
Light is right! (Colin Chapman)
vitrail
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Wasquehal
Sebastreet est probablement un photographe prolifique extrêmement publié dans diverses revues, d'où le risque qu'il prend. et si j'ai bien compris son métier: publier des reportages, avec l'accord des personnes photographiées, donc.
Pour nous, le risque est quand même moindre et je pense qu'il faut continuer à créer, qu'est-ce que cela veut dire ? Simplement prendre des images de qualité, en street, le plus discrètement possible, donc, on ne peut perdre de temps et de crédit à demander à chacun une autorisation pour une image dont on ne sait même pas, lorsqu'on la prend, si elle sera publiée ou pas.
La prudence s'arrête là où commence l'acte créatif. Créer, c'est bien prendre des risques. Risques mesurés, rappelons-le encore.
SEBASTREET
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Depuis le 21 sep 2016
Paris
vitrail a écrit :
Sebastreet est probablement un photographe prolifique extrêmement publié dans diverses revues, d'où le risque qu'il prend. et si j'ai bien compris son métier: publier des reportages, avec l'accord des personnes photographiées, donc.
Pour nous, le risque est quand même moindre et je pense qu'il faut continuer à créer, qu'est-ce que cela veut dire ? Simplement prendre des images de qualité, en street, le plus discrètement possible, donc, on ne peut perdre de temps et de crédit à demander à chacun une autorisation pour une image dont on ne sait même pas, lorsqu'on la prend, si elle sera publiée ou pas.
La prudence s'arrête là où commence l'acte créatif. Créer, c'est bien prendre des risques. Risques mesurés, rappelons-le encore.


Tout à fait d'accord avec toi, néanmoins attention aux reprises de tes photos via internet, même si elles sont en basse résolution...
Surtout lorsque je vois des portraits hyper serrés avec un beau regard, là il n'y a plus de discrétion, il y a un portrait, point ! Et donc forcement la personne est reconnaissable d'où le droit à l'image.
Mais heureusement que l'on peut encore faire des photos librement, et il faut surtout ne pas s'arrêter de créer, surtout avec ce bel, que dis-je, ce formidable outil qu'est le Q...
AlexR
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Habitué
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Depuis le 13 jan 2017
VAR (83)
Je vois que le sujet fait débat!

Intéressant le témoignage de Sebastreet...
Je pense que je vais continuer a faire comme d'habitude:

-Prendre des photos de rues
-Ne poster sur le net que celles où il n'y a personne
-Garder juste pour moi celles où il y a des gens

Ca va être dur... :shock:
"Rien sans peine"
Fift
Vieux briscard
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Paris
Le cas que mentionne Sebastreet est un peu particulier puisque le sujet de la photographie (un médecin) a de fortes chances de lire le support de publication (journal à destination … des médecins). Il est donc extrêmement probable qu'un médecin se reconnaisse sur les clichés.

Pour des photos de rue publiées sur Summilux, il faudrait déjà que la personne photographiée vienne fréquenter le forum - et si elle le fait, c'est souvent qu'elle s'intéresse à la photo et vraisemblablement moins sujette à se formaliser d'un cliché pris à la sauvette. Bref, peu de risque ...
Voxen
Régulier
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Nice
Pour une pratique amateur de la photo ne vous prenez pas trop la tête... le risque d'être poursuivi est extrêmement faible, si vous l'êtes la plupart du temps ça se réglera à l'amiable avec retrait de la photo en question, et dans le pire des cas (si le tiers est vraiment retors) la condamnation s'élèvera au versement de quelques centaines d'euro... Bref à mon avis brider sa photographie de rue par peur des représailles me semble dommage, mais chacun fera selon ses convictions ;)
rax
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Depuis le 27 juin 2015
Lille
Dans 99% des cas, le droit à l'image protège les cons, les cupides ou les deux.

Où se situe très précisément le curseur du risque de dommages intérêts, personnellement je m'en moque : je m'assoie royalement sur un principe que je désapprouve.
A mes risques et périls.
Mais je ne briderai jamais ma modeste créativité pour le simple respect d'une loi inique.

J'ai eu la chance à deux ans d'intervalle d'avoir 2 portfolios dans la revue CI : à chaque fois, il s'agissait de photos de street. Je n'avais aucune autorisation des personnes photographiées (cela dit, le risque était limité : les lieux étaient New York et le Canada). En revanche, il y a dix ans, j'ai réalisé un reportage très dur dans une maison de retraite (un mouroir) en vue d'une expo et, pourquoi pas, d'une parution : non pour des raisons légales mais éthiques, il m'a semblé évident de demander l'autorisation (écrite) des familles.
Fift
Vieux briscard
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Depuis le 15 juin 2010
Paris
rax a écrit :
.
Mais je ne briderai jamais ma modeste créativité pour le simple respect d'une loi inique.



Justement Rax, contrairement à l'idée répandue, la loi protège largement le photographe. Sauf à ce que le sujet soit présenté en situation dégradante / déshonorante. La loi me paraît du coup plutôt bien faite.
Du coup, comme l'indique Chope Man, le savoir protège des cons :wink: .

J'ai l'impression qu'il y a souvent confusion avec le "droit à l'image" des personnes célèbres, pour lesquels une utilisation de l'image par un tiers provoque un préjudice financier. Comme il y a préjudice, il peut y avoir dommages et intérêts à payer pour le photographe.
Mais pour une personne lambda, la simple publication ne provoque aucun préjudice. Donc aucun dommages et intérêts, c'est la base du droit français il me semble.
Gilles T
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Paris
rax a écrit :
Dans 99% des cas, le droit à l'image protège les cons, les cupides ou les deux.


Débordant d'intelligence :non:
Gilles T
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