Aujourd'hui, dans
Le Monde, un article très intéressant sur la politique des grands ensembles, et leur devenir.
Il présente l'intérêt, à mon avis, d'insister sur l'importance de l'urbanisme, et non de l'architecture elle-même, tout en pointant la responsabilité des architectes qui ont accepté de réaliser ces grandes opérations sans se soucier de leur devenir.
citation :
"Les grands ensembles étaient, pour beaucoup d'architectes, des opérations purement techniques, qui leur permettaient de vivre comme des nababs, regrette Paul Chemetov, qui totalise quelque 7 000 logements sociaux (mais jamais plus de 300 à la fois). Les architectes des grands ensembles n'auraient jamais eu l'idée d'y vivre eux-mêmes. Les grandes agences ne prenaient pas de commandes au-dessous de 1 000 logements. Elles établissaient trois ou quatre modèles et les empilaient comme des Lego pour concevoir des villes entières, sans s'interroger sur la commande ni sur le contexte local."
L'affirmation de Paul Chemetov est à nuancer. Marcel Lods vivait dans son opération des "Grandes Terres" à Marly-le-Roi, citée également dans l'article :
citation :
Pour la défense de ces cités, Paul Chemetov et Jean Dubuisson rappellent que la qualité du bâti, la préservation de l'équilibre social et des équipements ont permis à certains grands ensembles de durer : les barres de Dubuisson à Chambéry et à Montparnasse, de Pouillon à Meudon, de Lods à Marly, d'Henri-Labourdette à Sarcelles...
Il me semble que Roland Castro (dont l'action et les positions sont par ailleurs souvent discutables) résume bien le problème :
citation :
"Le décor n'a pas créé la misère, mais la misère a trouvé son décor", résume Roland Castro.
Enfin, il me semble que l'exemple des Ulis illustré par LaurentT montre bien que l'action sur les "quartiers" ne peut se résumer à tenter de leur donner des formes urbaines traditionnelles, car, comme le souligne Bernard Reichen,
citation :
"La forme urbaine n'est pas pathologique par elle-même. Les grands ensembles étaient les premiers jalons d'une ville hors les murs, alors que depuis des siècles la ville se constituait par intégration progressive des faubourgs. Cette rupture n'était pas une erreur. Elle signe le passage de la ville ancienne, radioconcentrique, à une ville territoire, qui est la réalité d'aujourd'hui. En ce sens, beaucoup des articles de la Charte d'Athènes sont pertinents."
Je nuancerais cette dernière affirmation, en faisant remarquer que souvent, les opérateurs publics de l'époque savaient que tous les moyens nécessaires n'étaient pas mis en œuvre ; en particulier, les implantations étaient généralement, non pas le résultat d'une réflexion sur les territoires et ce qu'habiter veut dire, mais celui du hasard des opportunités foncières.
Article complet disponible sur le site du
"monde.fr" sous le titre
L'utopie manquée des cités-dortoirs