Dans le genre plus angoissant, Téhéran. Je prends une photo d'une place assez moche. Un bassidji saute d'une moto et demande mon M6. Je refuse. Il demande à voir la photo. Un passant compatissant s'offre à faire la traduction. J'explique que ça n'est pas un numérique. Lui explique qu'il y a interdiction de photographier (ce qui n'est pas vrai, les panneaux d'interdiction se voient bien à Téhéran), que c'est de l'espionnage, qu'il veut voir la portée de mon zoom. Deux autres policiers arrivent, je n'en mène pas large. Mais j'ai pas mal de photos bien sur la pellicule alors je résiste encore. Une voiture de police s'arrête. Le vieux passant continue de traduire et d'expliquer mais ça sent vraiment le roussi.
Il me chuchote "vous ne pourriez pas faire quelque chose". C'est une fin de pellicule et je suis verte de perdre les photos mais je ne me vois pas partir au commissariat. J'ai passé mon temps à rajuster mon voile pour qu'on ne voit pas un millimètre de cheveux devant ce monsieur à moitié torse nu.
Donc je rembobine et j'ouvre le boitier, prends la pellicule dans ma main, pensant la lui donner.
C'est alors que le bassidji se détourne. Je crois qu'il a pensé que j'avais détruit le film. J'ai donc mis la pellicule dans ma poche et je suis aussi partie.
J'étais toute faible, m'attendant à entendre un ordre péremptoire dans mon dos. Rien !
Le numérique a un vrai avantage dans certains pays : on peut montrer ce qu'on a pris et ne pas passer pour un espion avec du matos secret.